Émeutes : face aux dégâts, quelle est la réponse des assureurs ?
Les émeutes qui ont éclaté à la suite du décès du jeune Nahel, tué par un policier après un refus d’obtempérer, ont semé le chaos dans nos villes. Ce déferlement de violence a provoqué des dégâts matériels considérables : on dénombre à date 6 000 véhicules incendiés et 1 100 bâtiments dégradés sur l’ensemble du territoire.
Alors que le pays tente de se remettre de ces nuits infernales, une question se pose : qui assumera la responsabilité financière des dommages causés ? Les propriétaires et commerçants victimes de ces violences pourront-ils être indemnisés à la hauteur du préjudice subi ?
Les victimes en quête d’indemnisation
Commerces, restaurants, hôtels, bibliothèques, écoles… Les émeutiers n’ont épargné personne et le patron du Medef annonce 1 milliard d’euros de dommages. A titre de comparaison, les dégâts causés par les émeutes de 2005 durant 4 semaines avaient coûté 200 millions d’euros. Un montant largement dépassé aujourd’hui en l’espace de quelques jours.
Cette violence aveugle a des conséquences dévastatrices pour les propriétaires des biens endommagés qui voient le travail d’une vie parti en fumée. Condamnés à fermer boutique temporairement ou définitivement dans les cas les plus tragiques, l’indemnisation à laquelle ils peuvent prétendre diffère selon le contrat d’assurance souscrit.
- Marseille : 100 millions d’euros pour les commerces saccagés
- Ile-de-France : au moins 20 millions d’euros pour les transports publics
- Montpellier : plus d’un million d’euros
- Limoges : 100 000 euros
estimations au 5 juillet 2023
Les assureurs mobilisés pour faciliter les démarches
Les attentes formulées par Bruno Le Maire à l’encontre des assureurs sont compréhensibles, mais ce nouveau “quoi qu’il en coûte” nie les limites inhérentes aux contrats d’assurance. En effet, assureurs et assurés sont tenus par des engagements mutuels définis dans le contrat et chaque partie en accepte les termes.
Malgré cela, les assureurs se sont mobilisés pour apporter leur soutien aux victimes, se montrant aussi arrangeants que possible envers les sinistrés et dépassant parfois les recommandations du ministre de l’économie. La fédération France Assureurs a ainsi partagé ses consignes aux assureurs, invitant ses membres à prendre 4 mesures phares :
- allonger les délais de déclaration de sinistre à 30 jours (contre 5 jours habituellement)
- accélérer le processus d’indemnisation
- faciliter le versement d’acomptes pour les situations complexes
- faire du “cas par cas” pour les petits commerçants, en réduisant notamment les franchises contractuelles
Les assureurs n’ont pas tardé à prendre des mesures fortes pour venir en aide à leurs clients. Axa France a par exemple décidé d’étendre sa garantie émeute à tous les assurés professionnels bénéficiant d’une protection contre le bris de glace et d’appliquer une franchise unique, quel que soit le nombre de sinistres déclarés ou de garanties activées. La Macif, le Crédit mutuel, CIC Assurances, Generali ou encore le Crédit Agricole ont également pris position en faveur de leurs assurés.
L’appel de France Assureurs ainsi que les initiatives des compagnies témoignent d’une volonté de répondre aux besoins urgents des assurés frappés par les émeutes.
Voitures incendiées, commerces vandalisés ou pillés : comment se faire indemniser ?
Les particuliers et professionnels dont les biens ont été incendiés ou vandalisés peuvent être indemnisés par leur assureur, conformément aux contrats qu’ils ont souscrits.
Véhicule brûlé ou endommagé
Si le véhicule a été incendié, le propriétaire peut être indemnisé s’il a souscrit la garantie incendie, présente dans les assurances auto au tiers étendu ou tous risques. Avec un contrat au tiers couvrant uniquement la responsabilité civile, les dégâts ne seront pas pris en charge par l’assureur.
La victime dont la voiture a été détruite par le feu dispose toutefois d’un recours si elle n’avait pas souscrit une garantie incendie. Elle peut en effet solliciter la CIVI (commission d’indemnisation des victimes d’infraction) et percevoir une indemnisation maximale de 4 601€ si ses ressources annuelles sont inférieures à 27 606€ (plafond 2023).
En cas de véhicule dégradé, seule la couverture “dommages tous accidents” garantit une indemnisation à l’assuré.
Quant au montant de l’indemnisation, il dépend du contrat souscrit.
Commerces endommagés ou pillés
La majorité des commerçants ont souscrit une assurance multirisque professionnelle. La garantie “émeute et mouvements populaires” peut alors couvrir les dommages matériels subis par le commerce : vitrine brisée, incendie, dégradations, vol…
En revanche, en cas de fermeture totale ou partielle, le manque à gagner n’est pris en charge que si l’assuré a souscrit une garantie “perte d’exploitation”.
crédit photo : Reuters